Les compétences de l’expertise. Le cas de la fabrication d’évaluations de sûreté nucléaire à l’IRSN
Jury
- Caroline Datchary, professeure de sociologie à l’Université de Toulouse II
- Pierre Fournier , professeur de sociologie à Aix Marseille Université
- Benoît Journé, professeur en sciences de gestion à l’université de Nantes
- Thomas Reverdy, professeur de sociologie à Grenoble INP
- Pascal Ughetto, professeur de sociologie à l’Université Paris Gustave Eiffel
- Christine Vidal Gomel, professeure en sciences de l’éducation à l’université de Nantes
Résumé
Ce mémoire original d’habilitation à diriger les recherches porte sur le travail des chargés d’évaluation en sûreté nucléaire de l’IRSN, qui sont décrits comme des « experts-scientifiques » (Roqueplo, 1997), autrement dit des individus qui rendent aux pouvoirs publics des expertises étayées scientifiquement. Les experts constituent une figure familière des industries à risques. Leur activité est toujours investie d’enjeux, d’espoirs, d’attentes et est parfois contestée. Mais, au fond, qu’est-ce que concrètement réaliser une expertise et quelles sont les compétences mises en œuvre dans cette activité ? La fabrication des expertises à l’IRSN s’inscrit dans un cadre institutionnel qui en détermine les grandes étapes, les modalités de réalisation et régule les échanges entre les acteurs concernés. Mais l’expertise est aussi un travail, celui des chargés d’évaluation en sûreté nucléaire, et comme toute activité, sa réalisation ne se laisse pas enfermer dans un cadre normatif. Si les évaluations de sûreté ciblent les risques inhérents à l’utilisation de l’énergie nucléaire, fabriquer une expertise fait aussi courir des risques au regard du retentissement possible d’un texte principalement technique mais aux conséquences sociales et politiques. Et c’est aux experts que revient en grande partie de prendre en charge collectivement et individuellement ces risques. Ce travail montre que l’organisation, les collectifs de travail et les acteurs, pour faire face à ces risques, déploient de nombreuses modalités de production qui font de l’expertise une activité collective et transverse reposant en particulier sur la mobilisation d’une compétence collective qui se construit et se manifeste en situation, dans la confrontation au réel.