Intégration de l’étude de la biodistribution des polluants dans l’évaluation du risque écologique. Vers l’émergence d’une valeur seuil de bioaccumulation toxique.
Olivier Simon a soutenu son HDR le 9 avril 2013 à Bordeaux.
Jury
Mme Magalie Baudrimont, professeur à l’Université de Bordeaux 1
M. Alain Boudou, président du PRES de l’Université de Bordeaux
M. Paco Bustamante, directeur de l’équipe AMARE et professeur à l’Université de la Rochelle
M. Peter Campbell, chaire de recherche du Canada à l’INRS
M. Alain Geffard, directeur de l’IAE à l’Université de Reims Champagne-Ardenne
M. François Paquet, expert sénior à l’IRSN
Résumé
L’objectif de ce travail de synthèse a été d’évaluer les capacités de transfert et d’accumulation de l’uranium dans les organismes aquatiques continentaux. Ces capacités ont été caractérisées par les taux de transferts milieu/organismes, les échanges entre les différents compartiments biologiques et l’identification des fractions subcellulaires cibles. L’ensemble des données est actuellement utilisé pour caractériser les conditions d’exposition des organismes, étape indispensable de l’évaluation du risque écologique, et pour suivre le devenir de la substance dans le réseau trophique afin d’évaluer son transfert dans l’écosystème et in fine à l’homme. Enfin, elles permettent de déterminer plus précisément les débits de dose dans les organismes après exposition à l’uranium.
Par conséquent, les études doivent être représentatives des conditions d’exposition rencontrées en milieu naturel. C’est pourquoi, les deux voies d’exposition, colonne d’eau et voie trophique ont été abordées en évaluant respectivement leurs capacités de transfert et les effets associés. La compréhension des mécanismes d’accumulation d’un contaminant est une des composantes nécessaires à l’évaluation du risque écologique. Nos travaux ont par conséquent abordé l’étude des effets toxiques pour établir des relations entre les niveaux d’accumulation et les effets. L’ensemble des données présentées ici tente de quantifier cette relation et d’identifier la fraction toxique bioaccumulée. Les effets recherchés englobent ceux déterminés par l’intermédiaire de biomarqueurs (interactions polluants/activités biologiques : génotoxicité, marqueurs enzymatiques et d’expression génique) et ceux présentant une significativité écologique avérée (mortalité et reproduction). Au cours de l’évaluation des capacités de transfert de l’uranium, plusieurs organismes modèles (bivalve, écrevisse, poisson) ont été testés. Ces modèles ont été retenus en fonction de leur représentativité écologique et des critères d’effet pouvant être mesurés, afin de dresser au mieux le lien entre l’exposition, les capacités d’accumulation et les effets. Les niveaux (faible versus fort), la durée (aiguë versus chronique) et les modalités (directe versus trophique) d’exposition ont été choisis pour assurer le réalisme des expositions rencontrées en milieux naturels et pour évaluer leur impact sur les capacités de transfert et de distribution.
Parmi les principaux résultats, l’accumulation de l’uranium après exposition directe et trophique dans les gonades du poisson ainsi que son transfert maternel sont des éléments majeurs. De plus, l’exposition en conditions contrôlées de laboratoire, réalisée avec une biodisponibilité optimisée facilite l’accumulation dans les organismes. Ces résultats nous conduisent à envisager plusieurs perspectives. Notamment, la confrontation entre les études menées en conditions contrôlées de laboratoire, via l’utilisation de milieux simples d’exposition représentant potentiellement les valeurs maximales de transfert, d’accumulation et d’effets, et les études in situ, pourrait être réalisée pour évaluer le degré de conservatisme des études menées au laboratoire. Afin d’augmenter la représentativité des modalités d’exposition, les études de transferts de l’uranium pourront être réalisées après pré-exposition des modèles biologiques à l’uranium au niveau du bruit de fond géochimique naturel. Cette approche permettra d’évaluer l’impact sur les capacités d’accumulation et de transfert, de la stimulation des mécanismes de prise en charge et de transport subcellulaire des organismes par des très faibles niveaux d’exposition rencontrés sur le terrain.
De plus, la présence d’uranium dans les gonades et les œufs du poisson modèle, après exposition directe et trophique confirme un transfert maternel et conduit à des effets délétères chez la descendance. L’efficacité de la prise en charge et les cibles cellulaires de l’uranium pourront par conséquent être étudiées en prenant en compte le transfert multi-générationnel pour déterminer de façon réaliste les valeurs seuils de bioaccumulation, responsable des effets toxiques.